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Le Bas-Canada vers 1820

Le Bas-Canada  vers 1820

Une question d'Alexis de Tocqueville

Notice: voici un dialogue entre un observateur français et un paysan canadien- français. Le Français s’étonne que les Canadien français ne s’établissement pas davantage sur les terres disponibles. Le paysan lui répond ceci : «Mais pourquoi que vous gardez votre femme, quoique celle de votre voisin soit plus jolie?» Que veut-il dire par là?

Extrait:

L'observateur - «Pourquoi restez-vous si serrés au lieu de vous étendre dans le pays?

Le paysan - Nous avons tort, nous sentons bien que nous finirons par être enveloppés par les Anglais; il y a déjà là tout près des bas de soie (Irlandais et Écossais émigrants) qui viennent d'arriver. Mais que voulez-vous? Nous sommes nés là; on a ses parents, ses amis, son champ, dans un endroit, on ne saurait aller ailleurs.

L'observateur - Mais ceci n'est pas raisonnable. Avant tout, il faut vivre. Vous êtes heureux aujourd'hui; mais le champ qui vous suffit aujourd'hui sera insuffisant lorsque votre famille sera doublée ou triplée. Alors vous voudrez avancer dans les terres, mais déjà elles seront prises. Vous voyez bien qu'il faut vous en emparer les premiers, sans quoi votre bonheur n'a point d'avenir.

Le paysan - C'est vrai, nous avons tort, nous serions mieux en faisant comme vous dites. Mais pourquoi que vous gardez votre femme, quoique celle de votre voisin soit plus jolie?»

Source

Gustave de Beaumont cité dans Alexis de Tocqueville. «Lettre du 28 août 1831.» Regards sur le Bas-Canada. Montréal, 2003. p. 296-297.